Devenir paysage. Exposition d’Alexandra Roussopoulos, Galerie LIGNEtreize

Du 2 au 30 novembre 2024
Galerie LIGNEtreize
Véronique Philippe-Gache
29 rue Ancienne
1227 CAROUGE-GENEVE
http://www.galerielignetreize.ch/art/

Movimento 4, 2024, crayon de couleur et acrylique sur papier de riz marouflé sur toile, 80x100cm

De la série de peintures «Movimento» est née une danse créée par la chorégraphe Manuela Bachmann Bernasconi. Une vidéo de Felix Bachmann Quadros en restitue l’expérience et accompagne l’exposition.

Il n’est de mer qui fût montagne

Des tableaux peints par Alexandra Roussopoulos à Bedigliora on voit d’abord le heurt des nuées entre elles et le soulèvement des montagnes révoltées. C’est comme si l’artiste avait épousé les grands mouvements géologiques du Tessin et capté cette énergie qui provient, dit-on, de la collision entre les plaques africaine et européenne. À ces bouleversements tectoniques, s’ajoutent de puissants mouvements maritimes, flots dont l’ampleur et la blancheur indiquent qu’ils ne sauraient être de paisibles lacs.
Cela ne fait pas de doute, Alexandra Roussopoulos n’a pas peint exactement les paysages qu’elle avait sous les yeux. La mer, c’est elle qui l’a apportée, de Grèce probablement. En se détachant du motif, elle a fait œuvre de peintre, accouchant de compositions complexes faites de tumultes intérieurs, de visions tessinoises et de mystérieuses réminiscences. Dans cette série de peintures, justement intitulée « Movimento », la lumière vient féconder la matière pour donner à voir la création du monde, le moment où les éléments, d’abord confondus, se séparent et se mettent en mouvement, deviennent paysages.
Ce monde premier, caressé par un vent qui se confond avec le souffle de l’âme, provoque chez le regardeur un vacillement, une secousse qui peut conduire à une vertigineuse perte de repères. Comme chez Turner, la ligne d’horizon semble vouloir disparaître, pour laisser voir du monde le devenir : les mers érigées en montagnes, les nuages tentés par l’orage, l’ouverture des océans. Mais surtout, ces paysages révèlent un ailleurs qui est pour la parole, souffle court de notre pensée‡, inaccessible. Ainsi la peinture d’Alexandra Roussopoulos donne-t-elle accès à un monde que le langage ne dit pas, à une lumière dont le mystère demeure.

Matthieu Gounelle
‡ Dante, Paradiso XXXIII, 121-122

Alexandra Roussopoulos est née en 1969 à Paris, de nationalité suisse et grecque.
Au moyen de la peinture, elle interroge l’espace mental et physique dans lequel elle se trouve et renouvelle la question des rapports entre formes, couleurs et espace. Elle collabore régulièrement à des projets artistiques collectifs et a pris part à de nombreuses résidences d’artistes en Chine, Grèce, Irlande, Slovénie, Suisse, Croatie et Algérie. Les œuvres présentées à l’occasion de cette exposition ont été réalisées au cours d’une résidence à la Fondation Casa Atelier Bedigliora (Tessin) en 2024. Alexandra Roussopoulos expose régulièrement en Suisse et à l’étranger, et a reçu le prix d’Arts Visuels de la Fondation René Liechti en Suisse en 2010 et le prix de peinture Novembre à Vitry (France) en 2002. Elle a co-écrit, avec Callisto Mc Nulty et Géronimo Roussopoulos, le film Delphine et Carole, insoumuses réalisé en 2019 par Callisto Mc Nulty (Grand Prix de Genève, sélection au Forum de la Berlinale 2019, SFCC Prix Télévision du meilleur documentaire, Prix du Groupement National des Cinémas de Recherche, Prix du public FIFF, Étoile de la Scam 2019).

Movimento 5, 2024, crayon de couleur et acrylique sur papier de riz marouflé sur toile, 80x100cm

Aux éditions Naima,

Voir aussi sur le site le film de Hichem Merouche Venue, Revenue (2019, 32 min, HD) sur la rencontre d’Alexandra Roussopoulos avec la ville d’Alger, le temps d’une résidence d’artiste aux Ateliers Sauvages, ici sur le site.